Tout homme résidant sur ses terres, de même que tout individu y passant, était justiciable du seigneur,dès lors qu'il y avait été "couchant et levant", c'est-à-dire qu'il y avait séjourné vingt-quatre heures. Le seigneur rendait à l'origine la justice aidé d'un préposé ou proposé, que l'on appelait de ce fait un prévôt, un bailli, un sénéchal, un viguier, un voyer ou un maire, suivant les régions.
Le seigneur jugeait les causes qui lui étaient soumises en fonction de leur gravité et selon qu'il détendait le pouvoir de basse, de moyenne ou de haute justice. Si le 'bas-justicier" ne pouvait condamner qu'à des amendes, le "moyen-justicier" pouvait juger des délits et de certains crimes. Seul le seigneur "haut-justicier" pouvait connaître des affaires où il y avait eu effusion de sang, des crimes passibles de la peine de mort et des affaires où l'on recourait au duel judiciaire et, autrefois, aux ordalies. Le duel judiciaire, qui eut cours jusqu'au début du XIIIe siècle, obligeait les adversaires à se combattre à mort. Dieu, estimait-on, se chargeait de faire perdre l'homme en tort. Les ordalies, disparues plus tôt et appelées également "jugement de Dieu", consistaient à infliger à l'accusé une blessure ou une brûlure. Le fait que celle-ci guérissait correctement prouvait son innocence, alors que le fait qu'elle s'envenime le désignait comme coupable. De là nous vient l'expression "ne pas y mettre la main au feu".
Le seigneur "haut-justicier" jugeait parfois entouré de bons hommes ou de prud'hommes, sages et prudents. Il pouvait prononcer des peines corporelles, directement liées au méfait commis : le voleur se voyait amputé d'une main. Tout seigneur "haut-justicier" avait le droit de posséder une prison avec gardien ainsi que piloris, échelles et carcans, tous instruments de torture où l'on exposait le coupable, des heures durant, à la vindicte du peuple, qui pouvait librement lui envoyer à la figure des fruits pourris, des crachats, voire des jets d'urine. Enfin, signe visuel de la haute justice par excellence, le "haut-justicier" pouvait avoir des fourches patibulaires (gibets), où les criminels se voyaient "pendus haut et court", autrement dit à une haute potence et avec une corde courte.
Le château de Harzé possédait une prison. En novembre 1764, Ernest de RIXHON (un de mes ancêtres ) fût accusé d'avoir volé une brebis. Le maïeur Charles SOLIVEAU demanda sa comparution. Ernest étant en fuite, sa femme Marie-Catherine JACQUET et sa belle-mère Marie-Marguerite JACQUET furent emprisonnées à sa place ! La pauvre vieille dame était très malade et avait même été administrée ! ( portes et portails d'Ourthe-Amblève de René HENRY ). Marie-Catherine fût emprisonnée pendant deux mois avant de s'évader ! Pourtant, on lui avait mis de gros pesants aux pieds qui la serraient si fort que cela faisait enfler ses jambes.(Harzé dans le passé d'Amédée POLET). Quand on sait que Marie-Catherine et Ernest s'étaient marié début de cette année 1764 et que leurs première fille avait 4 mois au moment de l'arrestation de sa maman, on peut imaginer avec quelle sévérité étaient traité les " présumés coupables " en ce temps là.
pour aller à la prison il fallait emprunter le passage surélevé à gauche de la photo
D'ailleurs quelques années avant, le 28 avril 1750, le maître des hautes œuvres de Luxembourg vint supplicier par la corde un appelé Benoit MICHAUX natif de Villefranche en France. Ce voleur de grands chemins fût pendu à la potence de Harzé. Elle se trouvait au-dessus du bois de Bobémont à la campagne d'Awan. Le brigand avait été condamné pour, entre autres méfaits, avoir volé des habits, une croix d'argent, un double ducat et un fusil chez Hubert HOUSSONLOGE, habitant du hameau de ce nom.
Le 14 avril 1737, Englebert FONTAINE, fils de Nicolas, censier à Houssonloge, avait été condamné à être exposé au carcan pendant une heure pour avoir "mis des collets propres à prendre des bécassines ou perdreaux". Le carcan se trouvait en face de la maison LEGRAND, juste au point de jonction de la grand'route et du thier de l'Aide. Un jour, quelqu'un abattit cet instrument de supplice et il y eut sous le comte d'Eynatten une enquête approfondie pour trouver le coupable. Tous les habitants comparurent mais l'enquête eut uniquement pour résultat de révéler que c'était la nuit du samedi au dimanche que cela c'était passé et qu'on s'était aperçu du fait en allant à la messe. Le délit était grave car il portait atteinte au droit du seigneur.